Procès pour esclavage domestique: «En France, on a toujours tendance à minimiser les faits!» (22/01/2018)

JUSTICE Une quinquagénaire était jugée ce lundi à Nanterre pour avoir exploité une adolescente de 13 ans entre 2000 et 2005. Elle ne s’est pas présentée à l’audience…


« Ça ne vous embête pas de rester là devant nous ? Parce que, vous le savez, ce n’est pas vous la prévenue aujourd’hui », lance doucement la présidente. « Non, ça va aller », répond Leila*. Droite, face à la cour, la jeune femme attend ce procès depuis douze ans. La prévenue, elle, poursuivie pour « aide au séjour irrégulier » et « soumission d’une personne vulnérable à des conditions de travail ou d’hébergement indignes » n’a pas fait le déplacement, comme son avocate.

Au terme d’un interminable parcours judiciaire – une ordonnance de non-lieu et deux pourvois en cassation – le procès s’est finalement tenu devant le tribunal correctionnel de Nanterre. « Par décence pour ma cliente, les choses doivent prendre fin », a plaidé Me Juliette Vogel, l’avocate de Leila.

« L’enfer a commencé le lundi, c’était la rentrée »

Longuement, la présidente et ses deux assesseurs ont écouté la victime d’origine malienne décrire « l’enfer » qu’elle a vécu. Âgée de 13 ans lorsqu’elle arrive en France, Leila est prise en charge par une cousine éloignée de son père qui lui promet une scolarisation. Mais très vite, la préadolescente devient « aide ménagère ». Dans un foyer qui compte alors neuf personnes dont sept enfants, elle est la « bonne à tout faire ». « L’enfer a commencé pour moi le lundi, c’était la rentrée. Je me réveillais chaque jour à 6 heures – 6 heures 30 (…) et ne me couchais pas avant minuit ».

Sa « cousine », Mme D., maîtresse de maison lui confisque ses papiers d’identité. Leila passe le balai, la serpillière, amène les enfants à l’école, prépare les repas, s’occupe des courses et dort dans le salon sur un matelas en mousse. « Toute la journée, elle me tournait autour pour me surveiller. Je ne mangeais que quand il n’y avait personne et s’il y avait des restes (…) je n’avais le droit de me doucher que deux fois par semaine », raconte en pleurs la jeune femme. Coupée de sa famille, de son père resté au Mali, Leila s’isole et tait ses souffrances : « Elle m’avait dit que je pouvais aller en prison ou être renvoyée au pays si je disais quelque chose ».

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