Le 3 avril 2019, la Cour de cassation rend un arrêt à l’issue d’une longue procédure judiciaire concernant une jeune marocaine, victime de servitude domestique durant 7 années. Il s’agit alors de déterminer si cette personne peut ou non bénéficier de l’indemnisation du préjudice économique qu’elle a subi lors de sa période d’exploitation par le travail.
Les faits à l’origine de l’arrêt
Une jeune fille confiée à un couple tiers via une Kafala
A 11 ans, Mme B. fait l’objet d’une kafala. Il s’agit d’une forme d’adoption dans le droit musulman, qui ne prévoit pas le changement d’état civil. A l’époque, la mère biologique de Mme B. éprouve des difficultés à assurer l’éducation de sa fille. En la confiant à une famille d’accueil, elle souhaite que celle-ci veille à son éducation, ses besoins, et sa santé, comme elle le ferait pour sa propre fille.
De l’adoption à l’exploitation
Seulement, en 1994, la famille d’accueil amène Mme B. en France de façon illégale. Elle a alors 12 ans et n‘a aucune identité ni droit dans ce nouveau pays.
Pendant 7 ans, elle sera la domestique de sa famille d’accueil , s’occupant de la cuisine, du ménage, et des enfants, sans être scolarisée ni bénéficier de suivi médical.
Elle dort soit dans une pièce non chauffée, soit sur un matelas posé au sol dans la buanderie. Elle est interdite d’accès aux produits d’hygiène et à la salle de bain et fait l’objet d’insultes et de violence physique.
Le début d’une longue procédure judiciaire
7 ans après son arrivée en France, elle s’enfuit du domicile de sa famille d’accueil et se rend au commissariat pour faire état de sa situation. Commence alors un long processus judiciaire.
Dans un premier temps, la justice classe ce dossier sans suite, faute de preuve.
Accompagnée par le CCEM, Mme B. demande alors une instruction et de nouveaux actes d’enquête : l’interrogation des instituteurs qui auraient pu remarquer Mme B venant chercher l’enfant à l’école, des voisins qui auraient pu remarquer des signes d’exploitation, des caissières de supermarchés voisins, etc.
En parallèle, la victime est invitée à détailler son récit afin que les enquêteurs puissent y trouver des pistes à explorer pour trouver des preuves d’exploitation.